04 octobre 2015

Révolues



Le début est doux et sourd. Puis le rythme prend le pas au fur à mesure des minutes. L'ensemble reste malgré tout lancinant.
Ce morceau me renvoie à moi-même en me parlant une sorte de langage à la fois étranger et familier. Il touche quelque chose enfoui profondément en moi. J'ignore ce que c'est sauf que je me sens vulnérable et que je plonge instantanément dans une sorte de mélancolie aussi douce qu'amère.
Ce genre de morceau s'écoute en voiture, en pleine nuit, en excès de vitesse sur l'autoroute. 
Même s'il ne dure que 4 minutes et 57 secondes, je voudrais vivre dans ce morceau. Il est la parfaite bande sonore de mes nuits électriques et éthyliques sur fond de paillettes. Ces nuits qui m'étaient si chères, si habituelles mais si lointaines.
Ces nuits où plus rien n'avait d'importance que le simple fait d'être ensemble. Rien n'était grave. Ces belles nuits où la surprise était la condition. J'aimerais revivre ces nuits avec toi. Rechausser mes escarpins à paillettes. Consoler ton cœur. Recompter les étoiles et les verres, la tête à l'envers. Rejouer à 1,2,3 soleil, place Royale.  Enfiévrée, je lâchais totalement prise sans penser à demain. Contrairement à hier, aujourd'hui, je pense trop à demain.

Où je veux en venir? Je ne sais pas plus que toi. Je suis globalement paumée à tous les niveaux et à tous les points de vue. Et tout ce qui m'importe pour le moment c'est de laisser mon esprit se promener, traînasser.
Pondre des phrases qui n'ont peut-être aucun sens dans l'absolu mais qui, je l'espère, trouveront écho chez toi. Si tant est que je suis toujours lue. Hahaha. Je peux d'autant plus dire des bêtises. Plein de bêtises. 

Je déconne. S'il y a un endroit où je suis la plus honnête c'est bien ici. Même si, je n'y mets pas souvent les pieds. Tu en déduiras ce que tu veux. Je laisse aussi ton esprit divaguer. 
J'ai été sincère l'autre week-end mais c'était des personnes qui comptent pour moi. Pareil pour toi, une fois encore, je ne te fais pas de dessin. 
Oui, j'ai fait appel à quelqu'un pour remonter mes meubles juste avant que vous arriviez. J'ai vécu 2 mois comme une manouche. Par flemme et procrastination. Non, je n'ai rencontré personne d'intéressant depuis que je suis arrivée ici. Oui, j'ai beau chercher, je ne trouve (pour l'instant) pas de point positif à cette vie de 6 mois. A part les palmiers peut-être. C'est beau les ombres des palmiers à l'heure où la chaleur décline.  Je continue à chercher tout en étant persuadée du contraire. 
Mais ma sincérité s'est arrêtée là. Je n'ai pas pu leur expliquer mon envie quasi nulle de sociabiliser avec la faune et la flore. Je n'ai pas pu leur dévoiler ma solitude qui me grignote doucement en silence le cœur et l'esprit. Je n'ai pas pu leur exposer mon questionnement persistant sur demain. Je n'ai pas pu leur révéler à quel point la rencontre était insurmontable. Tellement insurmontable que je préfère l'oublier. Je n'ai pas eu le courage de gloser sur mon intime conviction qu'il est temps que tout ceci se termine. Au plus vite.

13 avril 2015

Schéma

Jeunes et déjà si vieilles, si abîmées dans leurs routines de couple et de vies de famille. 
Telle est la première description qui me vient à l'esprit quand j'entends mes collègues parler entre elles. 
Les côtoyer et entendre leurs discours peu épanouissants constitue un excellent contraceptif au couple, aux enfants, bref, au schéma commun qui, soit-disant, nous attend tous et toutes.

Elles n'ont pas la trentaine et pourtant elles sont entrées parfaitement dans le schéma de vie que la société nous impose. En couple longue durée (8-10 ans), avec 1 à 2 enfants et l'envie sûre d'en vouloir d'autres.

Au début, je voulais faire bonne impression et j'écoutais attentivement leurs péripéties domestiques. Je t'avoue maintenant que je fais semblant d'écouter en reprenant deux fois des frites.
Jeunes et déjà si vieilles dans leur manière de gérer absolument tout par défaut (enfants, corvées ménagères, boulot et merdes quotidiennes). Bien sûr, elles sont en couple avec des mecs qui se contentent de ramener beaucoup d'argent parce qu'ils ont des postes à responsabilités, qui sont incapables de s'occuper des gosses et de faire à manger.

Avec tous ces détails, car la vie quotidienne-hygiénique-sexuelle de mes collègues impudiques n'a plus de secrets pour moi, il est clair que mon célibat ne pèse plus que l'équivalent d'une belle plume de quetzal. Depuis le début de l'année, il s'est curieusement allégé. Son poids varie en fonction de mon environnement social. Même si paradoxalement, on ne m'a jamais autant renvoyé mon célibat dans la gueule depuis mon arrivée ici. 

Une fois de plus, force est de constater que je ne suis jamais parvenue à m'intégrer dans les échanges des collègues de travail. Je me suis résolue à être sans cesse en décalé car je n'ai pas de schéma mec-enfants et compagnie. Je n'ai pas d'histoires de caca, de bobos d'enfants, de mecs qui n'en fout pas une à la maison à raconter. Je n'ai pas à mimer les premiers mots ou la dernière mignonnerie de mon dernier. De ce fait, je n'ai pas grand chose à leur dire. Et cela ne constitue en aucun cas un problème car je n'ai absolument rien à leur prouver. Je m'affranchis de leurs regards et de ce qu'elles peuvent penser de moi car leurs vies domestiques ne me font absolument pas rêver. 

A leurs yeux, je me résume à une seule caractéristique. Je suis définie par un seul critère. Je suis célibataire. Apparemment, c'est l'essence-même de mon être. L'autre jour, j'ai eu le droit à la fameuse sentence : décris-nous-ton-mec-idéal-il-fait-peut-être-partie-de-nos-connaissances. J'ai commencé par répondre de manière évasive. Puis devant l'insistance, j'ai rassemblé tout mon courage et ma répartie en répondant que je n'avais pas envie de parler de ce genre de sujet. Encore moins avec vous ai-je pensé dans ma tête. 


Et puis quel est mon schéma? Je pense qu'une partie de la vérité réside dans le fait que... je n'ai pas de schéma. Jusqu'ici, mon parcours me le prouve. Et puis, la réponse ne m'intéresse pas. En réfléchissant deux secondes,... peut-être celui de prendre des risques et de sortir de sa zone de confort douillette et rassurante. Peut-être celui de vivre sa vie en toute indépendance, sans rendre de compte à qui que ce soit. 

30 mars 2015

Marguerite

Rédigé il y a quelques semaines...

Tu m'as téléphoné la semaine dernière. Tes coups de fil étaient réguliers depuis que j'étais partie.
Tu posais toujours les mêmes questions et je répliquais les mêmes réponses.
Cette fois-ci, en plus de se renseigner sur mon travail et ma recherche de logement, tu m'as demandé si j'avais trouvé un amoureux.  
- Oh non Mamy, pas déjà! 
- Tu as raison, tu verras ça après.
- Mais tu sais, vendredi, je vais manger chez une collègue qui m'a invitée.
- Ah! c'est gentil ça! 

...

- Bon, ma petite, le compteur tourne. Papy et moi on te souhaite une bonne soirée! A bientôt!

Ce fut la dernière fois que je t'ai eu au téléphone. Maintenant, je me souviens de cette dernière conversation dans les moindres détails. L'intonation de ta voix, ton rire et tes expressions. Malgré son caractère anodin, cette conversation me paraît aujourd'hui tragique. Nous nous sommes parlées sans savoir toutes les deux que c'était la dernière fois. 

Tu étais la dernière grand-mère qui me restait. J'étais ta première petite-fille et ton premier petit-enfant. 
Tu représentais un lien fort vers mon enfance la plus tendre et la plus paisible. Des images acidulées comme la glace au cassis, comme la tarte au citron que tu préparais à chacun de mes anniversaires, doux comme les pulls que tu m'as tricoté et sucrées comme les crêpes que tu cuisinais.
Mes premiers souvenirs de plage, c'était avec toi. Les dimanches d'été passés à l'ombre de ce petit bois que tu possédais avec Papy et rythmés par les pique-niques, les lectures et les jeux de palet.
Tous ces souvenirs heureux sont devenus temporairement encombrants et lourds.
Pourtant Mamy, quand je suis partie au mois de février pour le travail, j'ai eu le fort pressentiment de devoir revenir de manière imprévue. J'aurais aimé que ce ne soit pas pour te dire au revoir. Pas si vite en tout cas. 

25 février 2015

Repères

Le moment où j'ai accepté la proposition d'embauche Je ne réalisais pas.
Le moment où j'ai envoyé ma démission. Je ne réalisais pas.
Le moment où je me suis déplacée en quête d'un autre chez soi. Je ne réalisais pas.
Le moment où j'ai pris connaissance de ma date de déménagement. Je ne réalisais pas.
Le moment où j'ai fait mes cartons dans la précipitation. Je ne réalisais pas. 
Le moment où j'ai parcouru seule 1 200 km en voiture. Je ne réalisais pas.
Le moment où je me suis présentée à mon nouveau travail, à mes nouveaux collègues. Je ne réalisais toujours pas.

Maintenant? Difficile à dire! 
Je réalise progressivement que je suis loin de tous, de toutes et de tout. Je subis les effets gueule de bois de la distance. Et c'est pas beau à voir. 
Concrètement, j'ai réalisé l'autre soir que je ne pourrai certainement pas rentrer pour Pâques. Je sais que c'est une fête importante pour ma maternelle par exemple.
A l'instant T, je n'ai toujours pas de trouvé de toit à moi. 

Parenthèse logement : je n'ai jamais autant galéré à trouver un logement de toute ma vie. J'ai l'impression d'être à Paris. Déjà, très peu d'annonces me font tilt, ensuite j'élimine les appartements trop petits, trop grands, trop moches, trop chers, trop loin du taff, sans parking. Et il ne reste... rien! Ou dans le meilleur des cas, des apparts qui ne sont plus disponibles. 

Alors, je squatte, je suis en transit, j'ai le cul entre deux chaises, je ne suis pas installée. Tout ce que je voulais éviter. Par conséquent, cette situation accentue mon impression que tout ça c'est pour rire, que ça va cesser, que je vais rentrer à Kemper, retrouver ma vie plan-plan, mes amis qui le sont devenus, mon boulot payé au lance-pierre et sans perspective d'évolution et mon appartement chéri. (Un intrus s'est glissé dans cette phrase.)
Dit comme ça, ça fait rêver, hein. Mais ce que je veux dire c'est que les repères c'est quand même hyper rassurant mais emprisonnant en même temps. Tout comme les habitudes et la routine aussi. 
Ici, je suis privée de tous mes repères. Du coup, la transition est violente et brutale.

Avec le temps, elle se fera plus douce et plus facile. Et mes repères vont petit à petit se reformer. Parce que c'est important.

On en reparle dans plusieurs mois voire dans un an si j'ai bien fait de tout quitter, ma famille, mes amis, mon pays d'origine: France-Ouest. En tout cas, je serai là car tout ce chamboulement va certainement nourrir mon inspiration.

Ok j'avoue tout : j'ai uniquement voulu changer de vie juste pour pouvoir écrire sur mon blog et faire mon intéressante. Prout.

13 décembre 2014

Départ - 3

Curieusement, ma vie recommence. A la même période. 
Il y a 3 ans, je changeais de lieu de vie pour un nouveau travail.

3 ans après. La même situation se répète.  
Toujours sans attaches, je déguste égoïstement ma liberté d'agir. C'est dans ces moments-là que je savoure pleinement mon indépendance.


Je m'en vais. Je quitte (en-fin) Kemper l'endormie. C'était plus ou moins écrit. Immédiatement, j'ai su que je ne ferai pas ma vie, ici, totalement à l'ouest. Je ne me suis jamais sentie installée peut-être parce qu'à 26 ans je trouvais que c'était triste et déprimant de se sentir ancrée, posée quelque part.
D'ailleurs, cela se constate par mon salon qualifié de sobre par une amie l'autre soir et par ma résistance aux propos de ceux qui m'encourageaient à devenir propriétaire. D'ailleurs, j'ai fait le compte de trois déménagements en 4 ans, pour une durée moyenne d'un an et demi par appartement. J'ai la bougeotte. Un peu.

Je pars du principe que pour se sentir bien quelque part, il y a trois choses essentielles pour moi :
- le boulot
- l'environnement (ville, appart)
- les relations et les habitudes

Ces trois choses ne sont plus suffisantes depuis un an déjà.Il faut savoir quitter sa zone de confort, qui était devenue inconfortable ces derniers temps, pour se lancer, sauter dans le vide, dans l'inconnu.

Je leur ai annoncé la nouvelle et ils l'ont bien pris. Ils savent que je ne suis pas pleinement heureuse. J'ai souvent agi comme un troll, peut-être par déception de voir que contrairement à moi, ils avaient trouvé ce qu'ils cherchaient. Comme je l'ai souvent dit ici et ailleurs, je les aime beaucoup mais cela devenait urgent de partir, sous peine de moisir pour de bon. 

Et comme je ne fais jamais les choses à moitié, je traverse la France pour m'installer dans le Sud. Une histoire de 1 280 km. Beaucoup de dépaysement et de découvertes à la clé. A peine 12 heures de route. Nah! Une broutille!
Finalement, l'histoire de cet été n'était qu'un faux départ.